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Plaies pénétrantes de l’abdomen à l’hôpital provincial de Biltine au Tchad

Echos du « projet d’appui chirurgical aux hôpitaux provinciaux » à Biltine 

Le Tchad fait face à une carence en personnel qualifié surtout pour la pratique chirurgicale. Pour pallier cette situation, une convention a été signée entre le Ministère de la Santé et le CSSI en 2017 pour la mise à disposition de quatre (4) chirurgiens dans quatre (4) hôpitaux provinciaux et ce, dans le cadre de la coopération Sud-Sud.Les hôpitaux concernés sont les hôpitaux provinciaux d’Amdjaras dans l’Ennedi Est, de Biltine dans le WadiFira, de Pala dans le Mayo Ouest et de Sarh dans le Moyen Chari.

Les plaies pénétrantes de l’abdomen

 1. Introduction

Une plaie est dite pénétrante de l’abdomen, lorsque l’agent causal a créé une solution de continuité de la paroi abdominale avec effraction péritonéale.

Lorsqu’elle est compliquée d’atteinte viscérale, la plaie est dite perforante.

La fréquence des plaies pénétrantes a augmenté à travers le monde et varie d’un pays à l’autre. Elle est liée à une augmentation de la criminalité, à la disponibilité des armes et à la présence des conflits.

Aux Etats-Unis, les plaies pénétrantes de l’abdomen constituent actuellement un véritable problème de santé publique. Elles représentent 70% des traumatismes abdominaux, avec une majorité de plaies par arme à feu.

En Afrique, les fréquences les plus élevées sont observées en Afrique du sud ; l’équipe du Trauma Unit du Groote Schuur Hospital du Cap, qui est un centre traumatologique de haut niveau, enregistre en moyenne 114 plaies par armes à feu et 400 plaies par armes blanches par mois (dont environ 40 laparotomies) (Bautz, 2004). Les plus basses fréquences africaines publiées sont retrouvées à Lomé où Ayité et al. (Ayité, 1996) ont décrits 44 cas en 5 ans soit 0,73%.

Les plaies pénétrantes posent des problèmes d’ordre diagnostique et thérapeutique. Leur prise en charge est à l’heure actuelle un sujet de controverse. En effet le débat se situe entre une attitude classique, de la laparotomie exploratrice systématique et une attitude dite                   « abstentionnisme sélectif ».

Le but de ce travail vise à rapporter les résultats de notre expérience dans la prise en charge des plaies pénétrantes abdominales à l’hôpital provincial de Biltine.

2. Résumé

Durant la période d’étude (Avril 2023 –Novembre 2023), nous avons enregistré onze (11) patients admis au Service de Chirurgie de l’Hôpital Provincial de Biltine pour plaie pénétrante de l’abdomen.

L’âge moyen des patients était de 25,27 ans avec des extrêmes de 11- 42 ans et un sex-ratio de 4,5 H/F. La tranche d’âge la plus représentée était celle de 20 à 30 ans avec 6 cas (54,54%).

Les catégories socioprofessionnelles des opérés étaient les suivantes : cultivateurs, 4 cas (36,36%) ; commerçants, 2 cas (18,18%) ; militaires 2 cas (18,18%); ménagère, 2 cas (18,18%), sans emploi, 1 cas (9,09%).

La plupart des patients provenaient de la périphérie de Biltine dans 8 cas soit 72,72%.

Parmi nos patients, 7 avaient bénéficié d’une chirurgie et les 4 autres n’ont pas été opérés.

Le délai dans la prise en charge au bloc opératoire a varié de 30 minutes à 2 heures.

Les rixes étaient la cause du traumatisme dans 7 cas (63,63%).

L’agent vulnérant le plus utilisé était le couteau dans 7 cas (63,63%), suivi des armes à feu dans 4 cas (36,36%).

Chez tous les patients opérés, au moins une lésion viscérale avait été retrouvée ; le maximum de lésion était de 7 sur un seul patient.

Les gestes réalisés étaient : une suture digestive, une résection anastomose, et un lavage drainage (chez tous les patients).

Quatre (4) de nos patients (36,36%)  étaient admis avec un état de choc hypovolémique; le bilan complémentaire est limité à une numération formule sanguine, un groupe sanguin rhésus, une créatinémie et azotémie et une imagerie (Abdomen sans préparation, Echographie) pour certains.

Nous avons enregistré quelques complications à type de suppuration pariétale dans deux (2) cas ainsi qu’un (1) cas de décès à 12h post opératoire.

Le séjour moyen était de 9 jours.

 

3. Iconographie

Éviscération post traumatique due à un couteau

Éviscération post traumatique par arme blanche

Plaie du grêle causé par un fusil de chasse

Perforation du colon transverse par arme blanche

2eme perforation gastrique

Rupture hépatique par arme blanche

Rupture vésicale due à une plaie balistique abdominale

Image opératoire d’une première perforation gastrique par arme blanche

Image opératoire d’un éclat de balle abdominale

Equipe bloc opératoire

4. Conclusion

Les plaies pénétrantes abdominales sont extrêmement fréquentes à Biltine.

Elles concernent les jeunes adultes de sexe masculin.

L’arme blanche reste l’agent vulnérant le plus utilisé.

Une éducation des jeunes à la non-violence et l’application du code Pénal pour les coups et blessures volontaires est nécessaire.

 

Article préparé par Dr Abdoulaye Seydou,                                                                                                                                                                                      Chirurgien à l’Hôpital Provincial de Biltine